Malaise dans l’école secondaire: l’affaire de la Zanzara

Par ailleurs, la pro­duc­tion de richess­es au plan inter­na­tion­al est en pleine réces­sion, ce qui se réper­cute vio­lem­ment sur les pro­grammes nationaux de développe­ment. Tous ces fac­teurs mènent à une impasse. On don­nera à cette crise le nom de « con­jonc­ture », un terme suff­isam­ment vague pour con­stituer un excel­lent instru­ment de chan­tage face aux reven­di­ca­tions ouvrières. L’espérance sus­citée par la « coex­is­tence paci­fique » se désagrège face à la poli­tique des deux grandes puis­sances. Celles-ci ne sem­blent plus en effet se préoc­cu­per que de l’extension de leur zone d’influence mil­i­taire et économique à des régions tou­jours plus vastes d’un monde sec­oué par les révo­lu­tions et les guer­res ­d’indépendance.

La « coex­is­tence paci­fique » finit donc par appa­raître pour ce qu’elle est: un par­avent ser­vant oppor­tuné­ment à occul­ter les poli­tiques de dom­i­na­tion. En 1964, Palmiro Togli­at­ti, le leader his­torique du PCI, meurt de mal­adie en Crimée; aux con­grès du Par­ti, on voit pour la pre­mière fois s’opposer deux ten­dances (celle d’Amendola à droite, et celle d’Ingrao à gauche

1 Pietro Ingrao est né en 1915. Résis­tant, col­lab­o­ra­teur de L’Unità clan­des­tine pen­dant la guerre, il en devient le directeur entre 1947 et 1956. Député du PCI pen­dant dix lég­is­la­tures, il incar­ne, lors du XIe con­grès (1966), l’« aile gauche » du par­ti, en rup­ture avec le stal­in­isme. Elle s’inscrit dans la per­spec­tive d’une réno­va­tion du PCI sur le plan tant de la démoc­ra­tie interne que du « mod­èle de développe­ment ». Proche de la ten­dance du groupe Il Man­i­festo (Lucio Magri, Rossana Rossan­da), ce qui ne l’empêchera nulle­ment de vot­er l’exclusion de ses mem­bres en 1969, il défend alors une dynamique d’union entre les « gauch­es » des par­tis, le mou­ve­ment syn­di­cal et les mou­ve­ments soci­aux. Il meurt à 100 ans le 27 sep­tem­bre 2015


Gior­gio Amen­dola (1907–1980), qui sera opposé à Ingrao pour la suc­ces­sion de Togli­at­ti à la tête du par­ti, a lui aus­si été résis­tant. Au nom du PCI, il signe en 1943 le « pacte d’unité d’action » avec les social­istes et le Par­ti d’action, et intè­gre la même année le com­man­de­ment mil­i­taire des Brigades Garibal­di (avec notam­ment Lui­gi Lon­go et Gian­car­lo Pajet­ta). Au XIe con­grès, il défend une ligne de col­lab­o­ra­tion avec le PSI et la per­spec­tive d’une nou­velle majorité en avançant l’hypothèse d’une « réu­ni­fi­ca­tion » des gauch­es. Il est par­ti­san de la représen­ta­tion de la classe ouvrière dans les insti­tu­tions poli­tiques nationales et son action vise à faire du PCI un par­ti de gou­verne­ment. À la fin des années 1970, il sera à l’avant-garde de la répres­sion con­tre les mou­ve­ments de lutte armée, appelant dans L’Unità en juin 1977 à « bal­ay­er les équiv­o­ques afin de savoir qui veut com­bat­tre pour la démoc­ra­tie et est prêt à tous les sac­ri­fices, et qui est de l’autre côté » (voir à ce pro­pos chapitre 11 – Et puis il y a aus­si la nicodémite : entre­tien avec Gior­gio Amen­dola, p. 578 sqq.)

). Au même moment, une solide alliance entre la DC, les grands entre­pre­neurs, les entre­pris­es publiques, les social­istes et l’Église scelle le bloc du pou­voir bour­geois. Dans la société civile, les phénomènes de dis­sensus se mul­ti­plient, y com­pris sous des formes « démoc­ra­tiques2 Dans la suite du texte, le terme « démoc­ra­tique » ren­voie d’une part aux forces pro­gres­sistes de la « société civile », qui aspirent à une mod­erni­sa­tion des insti­tu­tions (et par­fois sim­ple­ment à « l’ouverture d’esprit » de cer­taines com­posantes de la bour­geoisie), et d’autre part, de manière plus spé­ci­fique après 1968, à ces expéri­ences de cri­tique du statut dis­ci­plinaire, du rôle social et de la pro­fes­sion. Ces secteurs « démoc­ra­tiques » par­ticiper­ont plus tard de ce qu’on appellera « la crise des pro­fes­sions », de l’éducation au jour­nal­isme, de la mag­i­s­tra­ture à la psy­chi­a­trie. C’est pourquoi on retrou­vera ce terme sou­vent accolé à des champs pro­fes­sion­nels (mag­i­s­tra­ture « démoc­ra­tique », 1964 ; psy­chi­a­trie « démoc­ra­tique », 1973)». Ils s’organisent en asso­ci­a­tions, en dehors des par­tis: la Ligue ital­i­enne pour le divorce (LID), par exem­ple, est fondée en 1964.

Certes, les revues auto­pro­duites plus engagées et plus rad­i­cales, comme les Quaderni rossi ou les Quaderni pia­cen­ti­ni, peinent encore à trou­ver un pub­lic. Mais on perçoit, à dif­férents degrés, les mul­ti­ples signes d’une aspi­ra­tion générale au change­ment. Les intel­lectuels « démoc­rates » avaient déjà don­né en Ital­ie un aperçu de leur engage­ment à tra­vers des films mémorables ou de nou­velles ten­dances édi­to­ri­ales. Mais de nou­velles œuvres ciné­matographiques ou lit­téraires, des essais inédits et sou­vent impor­tants arrivent désor­mais de l’étranger: Les Sen­tiers de la gloire et le Doc­teur Folam­our de Kubrick, les livres de Franz Fanon, Une Journée d’Ivan Den­nisso­vitch de Sol­jen­it­syne

3 Path of glo­ry, 1957 ; Dr Strangelove, 1963 ; Peau noire, masques blancs 1952 ; L’An V de la révo­lu­tion algéri­enne, 1959 ; Les Damnés de la Terre, 1961 ; Pour la révo­lu­tion africaine, 1964 ; Une Journée d’Ivan Den­nisso­vitch, 1962

, pour ne citer que ceux-là… Ils soulig­nent encore, par con­traste, le cli­mat d’asphyxie et pour tout dire de restau­ra­tion qui émane alors du sys­tème des par­tis et des insti­tu­tions en général.

La police et la mag­i­s­tra­ture con­tin­u­ent à faire office de bras armé et d’exécutant légal des intérêts du gou­verne­ment et du grand cap­i­tal. Les épisodes de répres­sion ne se comptent plus: la police tire et tue chaque fois qu’un con­flit éclate. La mag­i­s­tra­ture main­tient une pres­sion con­tin­ue en instau­rant une cen­sure préven­tive: des films, des livres, des revues, des man­i­festes, etc. sont sys­té­ma­tique­ment mis sous séquestre. Quant aux sen­tences ren­dues par les tri­bunaux, le plus sou­vent en ver­tu de critères moral­isa­teurs, elles font un usage abon­dant, suran­né et néan­moins inven­tif du tris­te­ment célèbre code Roc­co ­fas­ciste

4 Le code Roc­co, du nom du min­istre de la jus­tice de Mus­soli­ni sous lequel il a été pro­mul­gué, est encore le code pénal en vigueur en Ital­ie. Out­re un usage éten­du de la peine de mort, il rete­nait notam­ment le délit d’outrage con­tre la per­son­nal­ité de l’État

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La jeunesse ressent tout cela d’une manière immé­di­ate­ment exis­ten­tielle et pré-poli­tique

5 Ser­gio Bianchi attribue la pater­nité de cette notion à Elvio Fachinel­li : « Fachinel­li […] a mené cette bataille anti-idéologique à l’intérieur même du mou­ve­ment en s’intéressant notam­ment à ce qu’il appelait le “pré-poli­tique”. Il voulait com­pren­dre ce qu’il y avait avant le poli­tique dans la for­ma­tion de la sub­jec­tiv­ité mil­i­tante, quels sont les élé­ments qui déter­mi­nent une con­science com­mune de la révolte. Ce qui précède la lutte poli­tique, c’est la révolte sub­jec­tive qui n’implique pas néces­saire­ment une appar­te­nance théorique et idéologique préex­is­tante. Quand cette sub­jec­tiv­ité prend une dimen­sion de masse, on assiste à ce qu’on appelle les “mou­ve­ments de révolte exis­ten­tielle” », La horde d’or, jour­nal de tra­duc­tion n° 1, entre­tien avec Nan­ni Balestri­ni et Ser­gio Bianchi, sep­tem­bre 2008 – disponible

, qui se traduit par un besoin per­ma­nent de ques­tion­ner les réc­its offi­ciels. La réforme de l’enseignement sec­ondaire, par exem­ple, com­mence à laiss­er devin­er, sous son égal­i­tarisme appar­ent, les objec­tifs réels qui ont présidé à son insti­tu­tion. Car si la tri­par­ti­tion en fil­ières a été sup­primée au col­lège, elle est main­tenue dans le sec­ond degré entre les lycées, les écoles nor­males d’instituteurs, et les insti­tuts tech­niques, et la sélec­tion n’en est que plus rigoureuse. Dans cette phase de for­ma­tion de la con­science étu­di­ante, les formes de la con­tes­ta­tion n’ont encore rien de très rad­i­cal, par­ti­c­ulière­ment dans les lycées; mais les signes du malaise sont tan­gi­bles et révè­lent une frac­ture pro­gres­sive entre la jeunesse et les insti­tu­tions de l’État. 

En dépit de son car­ac­tère local et de ses lim­ites, l’affaire de La Zan­zara (le mous­tique) – le jour­nal des élèves du lycée Pari­ni de Milan – con­stitue en ce sens un épisode his­torique. En févri­er 1966, sort un numéro sur le thème « École et société », qui con­tient notam­ment une enquête menée auprès des lycéennes inti­t­ulée: « À quoi pensent les filles d’aujourd’hui? ».

Le lycée Pari­ni accueille depuis tou­jours les enfants de la « bonne bour­geoisie » milanaise. Situé au cœur des quartiers rési­den­tiels, il est con­nu pour être par­ti­c­ulière­ment sélec­tif et éli­tiste. Les élèves ne sont pas spé­ciale­ment tur­bu­lents, ils sont con­nus au con­traire pour leur engage­ment exem­plaire dans les études et leur solide respect des hiérar­chies. La plu­part des enseignants et même le pro­viseur affichent une cul­ture « démoc­ra­tique », et la direc­tion de l’établissement voit d’un œil favor­able l’autogestion du jour­nal par les lycéens. Le scan­dale de la Zan­zara n’a donc rien de com­mun avec les formes de con­tes­ta­tion qui vont éclore en Ital­ie moins de deux ans plus tard (et au regard desquelles il sem­ble presque anachronique). Cela ne l’empêchera pas d’atteindre assez vite une dimen­sion nationale.

Les rédac­teurs du petit jour­nal s’étaient en réal­ité bornés à inter­view­er un cer­tain nom­bre de lycéennes sur des prob­lèmes qui touchaient à l’enseignement de la reli­gion (une thé­ma­tique man­i­feste­ment intem­porelle) et à l’éducation sex­uelle. Dans l’éditorial, sous le titre « École et société », les rédac­teurs par­tent du con­stat que « […] l’un des points qui a fait accord entre tous (ou presque tous) les lycéens, c’est la grave défail­lance péd­a­gogique dont fait preuve, sur ces ques­tions, la société tout entière, et plus par­ti­c­ulière­ment l’école, arc-boutée sur des posi­tions qui le plus sou­vent ne tien­nent aucun compte de la réal­ité, et moins encore de la lib­erté des indi­vidus ». La Zan­zara avait déjà abor­dé la ques­tion de la reli­gion dans un numéro précé­dent, ce qui lui avait valu les cri­tiques des « pariniens » catholiques. Elle entend à présent ouvrir « un débat sur la con­di­tion de la femme dans notre société, en abor­dant les ques­tions du mariage, du tra­vail féminin, du sexe, et en exam­i­nant les répons­es apportées par les indi­vidus et la société ». Comme on le voit, il n’y avait là rien de bien scan­daleux: à les lire aujourd’hui, les con­clu­sions de l’enquête ne parais­sent ni très provo­ca­tri­ces ni même très inquié­tantes. Les répons­es des jeunes filles inter­rogées ne fai­saient prob­a­ble­ment que refléter un état d’âme assez répan­du à l’époque chez les jeunes les plus sen­si­bles. Com­ment lire autrement des affir­ma­tions telles que: « dans les rap­ports, je pose des lim­ites unique­ment parce que je ne veux pas courir le risque qu’il y ait des con­séquences. Mais si je pou­vais utilis­er libre­ment des con­tra­cep­tifs, je n’aurais pas de prob­lèmes de lim­ites »; ou encore: « les deux sex­es ont égale­ment le droit d’avoir des rap­ports avant le mariage ».

Il est bien évi­dent qu’au moment où elles sont for­mulées, ces cri­tiques du rap­port entre reli­gion et épanouisse­ment sex­uel peu­vent être perçues comme imper­ti­nentes ou agres­sives, mais elles sont surtout extrême­ment libéra­tri­ces. Une inter­viewée déclare: « La reli­gion, quand elle inter­vient dans le champ sex­uel, apporte surtout de la cul­pa­bil­ité; quand il y a de l’amour, il ne doit pas y avoir de lim­ites ou de freins d’ordre religieux. » Cela est plus vrai encore dès lors qu’il est ques­tion de famille et de mariage: « Si on m’offrait une vie entière­ment con­sacrée au mariage, à la mai­son et aux enfants, plutôt que de vivre ain­si, je me tuerais. »

Quoi qu’il en soit, la pub­li­ca­tion de cette enquête sus­cite de vio­lentes réac­tions de la part du groupe Gioven­tù stu­den­tesca (Giesse) dirigé par Don Gius­sani (qui fondera plus tard Comu­nione e lib­er­azione), et qui est assez bien représen­té dans les écoles milanais­es. Dans un tract signé « des Pariniens catholiques », ils soulig­nent « la grav­ité de l’offense faite à la sen­si­bil­ité et au sens moral com­mun [et] la lâcheté avec laque­lle, une nou­velle fois, on se joue de l’école et de son autorité ». La dés­ap­pro­ba­tion des futurs « cielli­ni6 Les « cielli­ni » sont les mem­bres de « Cielle », acronyme phoné­tique de « Comu­nione e lib­er­azione », tout comme « Giesse » est l’acronyme phoné­tique de « Gioven­tù stu­den­tesca ». Un peu comme si on abrégeait à l’écrit les Jeuness­es com­mu­nistes en « Jicé » » trou­ve un relais dans l’édition du soir du Cor­riere lom­bar­do (un quo­ti­di­en ago­nisant qui cessera de paraître peu de temps après), lequel « étale » lit­térale­ment l’affaire sur six colonnes à la une: « Une enquête pub­liée dans le jour­nal des élèves crée le scan­dale au lycée Pari­ni. » L’article est sat­uré de juge­ments sans appel («les déli­rantes affir­ma­tions de cer­taines ­lycéennes […]»), de par­ents boulever­sés qui ne songent plus qu’à retir­er leurs enfants du lycée favori de la bonne société milanaise et des protes­ta­tions d’une opin­ion publique trau­ma­tisée, prête à se lever pour défendre une société « saine et bonne » con­tre « cette vague de cor­rup­tion et de débauche » et à sol­liciter l’intervention immé­di­ate de la police et de la jus­tice.

Le jour même où est pub­lié l’article du Lom­bar­do, et sous la pres­sion des « Giesse », le juge Oscar Lanzi charge le sous-préfet Gio­van­ni Grap­pone (con­nu comme « la ter­reur des crim­inels les plus endur­cis ») d’ouvrir une enquête sur le petit jour­nal lycéen. Dès lors, en l’espace de quelques semaines, l’affaire de la Zan­zara va se déchaîn­er, d’abord au niveau local puis au plan nation­al, pour finir en une mémorable bataille sur la ques­tion des lib­ertés démoc­ra­tiques. Les noms des trois jeunes rédac­teurs, Mar­co De Poli, Mar­co Sas­sano et Clau­dia Bel­tramo Cep­pi (tous des pre­miers de la classe, abon­nés au « dix de con­duite ») sont très vite con­nus du grand pub­lic.

Presqu’immédiatement, deux camps enne­mis s’affrontent, dans la presse mais aus­si dans le sys­tème des par­tis. Après quelques hési­ta­tions, ceux-ci pren­nent unanime­ment fait et cause pour les élèves, à l’exception de la DC et du MSI. Par ailleurs, l’enquête judi­ci­aire se pour­suit et les trois lycéens sont con­vo­qués à la Pré­fec­ture pour être inter­rogés par le « ter­ri­ble » dot­tor Grap­pone. En voy­ant la jeune fille du groupe refuser une cig­a­rette, celui-ci émet­tra notam­ment ce com­men­taire: « Vrai­ment tu ne fumes pas? Alors tu n’es pas aus­si vicieuse qu’on peut le penser en lisant ton jour­nal. »

Entre-temps, un groupe de paci­fistes liés au Par­ti rad­i­cal7 Créé au milieu des années 1950, le Par­ti­to rad­i­cale s’imposera dans la vie poli­tique ital­i­enne à par­tir de la fin des années 1960 sous l’impulsion de Mar­co Pan­nel­la, qui sys­té­ma­tis­era le recours aux référen­dums pop­u­laires (prévus par la Con­sti­tu­tion) sur des ques­tions con­cer­nant société ital­i­enne. Il en sera de nou­veau ques­tion aux chapitres 9, 10 et 11. et des mil­i­tants du Cen­tro anti-impe­ri­al­ista milanais et de la Lega marx­ista-lenin­ista sont arrêtés. La nou­velle se répand, la néces­sité de pren­dre posi­tion sur le prob­lème des lib­ertés démoc­ra­tiques se fait de plus en plus pres­sante (l’existence d’une dis­si­dence à gauche du PCI se révèle à cette occa­sion aux yeux du grand pub­lic). Les jeunes rad­i­caux sont accusés d’avoir dis­tribué un tract con­tre la guerre et pour la recon­nais­sance de l’objection de con­science, les mil­i­tants marx­istes-lénin­istes quelques tracts con­tre la guerre du Viet­nam. Les imprimeurs qui ont repro­duit les tracts sont égale­ment arrêtés. Les man­dats d’amener sont émis par le dot­tor Lanzi, le même qui quelques jours plus tard défér­era devant le tri­bunal, en com­paru­tion immé­di­ate, les trois élèves du lycée Pari­ni, le pro­viseur Matalia et la respon­s­able de l’imprimerie qui avait repro­duit le petit jour­nal.

Comme on le voit, ces événe­ments soulèvent des ques­tions qui les dépassent par beau­coup d’aspects: la guerre du Viet­nam, l’antimilitarisme, la dis­si­dence de gauche, la lib­erté sex­uelle, la lib­erté religieuse, les pou­voirs de la mag­i­s­tra­ture et de la police, la lib­erté de l’enseignement et plus générale­ment la lib­erté de la presse et la lib­erté d’expression. Il n’en fal­lait pas davan­tage pour sus­citer un débat dont les développe­ments houleux excéderont de loin les faits incrim­inés.

Le mag­is­trat en charge d’interroger les trois lycéens (le dot­tor Car­ca­sio) jette encore de l’huile sur le feu: exhumant une vieille cir­cu­laire de 1933, il exige, lors de l’interrogatoire, de faire pass­er une vis­ite médi­cale aux trois « accusés ». L’objectif formel de cette dis­po­si­tion fas­ciste était de détecter chez les inculpés mineurs d’éventuelles tares physiques et psy­chiques, dans une logique lom­brosi­enne de caserne

8 Cesare Lom­broso (1835–1909), pro­fesseur de médecine légale, est l’un des fon­da­teurs de l’école ital­i­enne de crim­i­nolo­gie. Con­nu pour ses thès­es sur le « crim­inel né », il ten­tait, à par­tir d’études phrénologiques et phys­iog­no­moniques, de repér­er les crim­inels, con­sid­érant qu’il s’agissait d’une classe hérédi­taire iden­ti­fi­able par l’apparence physique. Il dis­tin­guait en Ital­ie la « race du Sud », qu’il jugeait inférieure, de la « race du Nord » et con­sid­érait que les femmes étaient moins sujettes à la crim­i­nal­ité en rai­son de leur moin­dre intel­li­gence et de la nature plus inac­tive de leur vie. Voir la dis­cus­sion de ces thès­es dans Stephen Jay Gould, La Mal-mesure de l’homme : l’intelligence sous la toise des savants [1981], Odile Jacob, 1997

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Les deux garçons, pris au dépourvu, acceptent de se livr­er à cet « effeuil­lage » pré­fec­toral, mais Clau­dia Bel­tramo Cep­pi tient bon et refuse cette injonc­tion ­humiliante. Cet ultime épisode provoque une nou­velle lev­ée de boucliers. Les défenseurs des lycéens afflu­ent à présent de toutes parts. Des cen­taines d’enseignants et d’intellectuels péti­tion­nent en signe de sol­i­dar­ité, les par­tis sont con­traints de pren­dre posi­tion et, tan­dis que l’affaire de la Zan­zara devient le cheval de bataille de la moitié des jeunes sco­lar­isés d’Italie, d’illustres juristes bran­dis­sent l’article 13 de la Con­sti­tu­tion qui garan­tit « l’inviolabilité de la lib­erté per­son­nelle ». Un comité se con­stitue pour assur­er la défense à la fois des mil­i­tants paci­fistes et des lycéens. Par­mi les avo­cats, on trou­ve Ser­gio et Giu­liano Spaz­za­li, qui livreront dans les années 1970 de for­mi­da­bles batailles pour la défense des mil­i­tants et des tra­vailleurs.

En réal­ité, l’affaire de la Zan­zara a fonc­tion­né comme un for­mi­da­ble révéla­teur de la sépa­ra­tion entre la société civile et l’État, qui touche tous les aspects et toutes les dimen­sions du sys­tème insti­tu­tion­nel. Les ques­tions soulevées par ce petit épisode d’intolérance provin­ciale ont fait tache d’huile, jusqu’à engager le par­lement, la prési­dence de la République et toutes les asso­ci­a­tions de mag­is­trats et de jour­nal­istes dans une pro­fonde réflex­ion cri­tique sur les maux de la société ital­i­enne.

Les étu­di­ants quant à eux tien­nent dans tout le pays des assem­blées débor­dantes, et organ­isent de grandes man­i­fes­ta­tions. Sur leurs pan­car­tes, on peut lire: « Nous finirons tous nus ou tous muets », ou encore: « La Con­sti­tu­tion vaut pour tous, à plus forte rai­son pour les étu­di­ants. »

Le procès de la Zan­zara (dont la défense compte quelques ténors du bar­reau: Pis­apia, Deli­ta­la, Dall’Ora) se retourn­era con­tre ceux-là mêmes qui avaient orchestré toute l’opération, et prin­ci­pale­ment les « Giesse » de Don Gius­sani. Il ouvre un proces­sus de réflex­ion cri­tique sur les espaces de la démoc­ra­tie, qui va peu à peu gag­n­er l’ensemble de la société ital­i­enne. Mais il con­tribuera aus­si à tiss­er autour du mou­ve­ment étu­di­ant nais­sant une série d’alliances démoc­ra­tiques qui se main­tien­dront jusqu’au début des années 1970.

Par-delà la relaxe juridique des inculpés, toute la polémique née de l’affaire de la Zan­zara tourne autour de la néces­saire mod­erni­sa­tion démoc­ra­tique des insti­tu­tions, dans une société où le poli­tique reste très en retard sur les usages soci­aux. C’est à par­tir de cette con­tra­dic­tion que les luttes étu­di­antes se rad­i­calis­eront au cours des années suiv­antes. À peine deux ans plus tard, les lycéens de Pari­ni pub­lieront un opus­cule inti­t­ulé Con­tre la sélec­tion de classe à l’œuvre à l’école, le con­di­tion­nement socio-économique, cul­turel et famil­ial de l’élève.

Le procès des anti­mil­i­taristes en revanche est relégué au sec­ond plan par la presse, en dépit de l’importance des ques­tions qu’il pose. Com­men­tant la sen­tence (relaxe pour eux aus­si), les Quaderni pia­cen­ti­ni écriront:

Des magistrats « indépendants », non incriminables et inamovibles

9 Quaderni pia­cen­ti­ni, n° 27, juin 1966

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« Anto­nio Mura­tori, avo­cat célèbre il y a un demi-siè­cle, évo­quait sou­vent cette recom­man­da­tion pater­nelle, du temps où il était étu­di­ant: “Bûche, Toni­no, bûche, ou tu fini­ras pro­cureur.” Quiconque a assisté au réquisi­toire “de fou furieux” – selon le mot d’un avo­cat catholique – du dot­tor Lanzi dans le procès de la Zan­zara, et à celui plus abject encore du dot­tor Alma dans le procès des tracts paci­fistes, serait en droit de penser que la sit­u­a­tion n’a pas évolué depuis cinquante ans. Notre défi­ance vis-à-vis du sys­tème judi­ci­aire reste en tout cas totale et de principe. En cela nous pour­rions répéter sans chang­er une vir­gule ce que nous écriv­ions il y a trois ans (QP n° 13, nov.-déc. 1963, p. 17–18) : “Notre code est fon­da­men­tale­ment fas­ciste, et la Con­sti­tu­tion elle-même ne sort pas d’une per­spec­tive clas­siste puisqu’elle est fondée sur le statu quo, c’est-à-dire sur l’inégalité de fait entre les citoyens, et sur ce pro­gres­sisme rare et ambigu qui, pour autant qu’il s’y man­i­feste, reste sans effet. Car depuis vingt ans, elle reste admin­istrée (tout comme le code) par des indi­vidus qui appar­ti­en­nent à la classe bour­geoise et qui par sur­croît for­ment une caste fer­mée et priv­ilégiée, à l’instar des mil­i­taires. […] Il n’y a pas, il ne peut pas y avoir de jus­tice tant qu’il n’y aura pas d’égalité entre les citoyens. La loi n’est pas égale pour tous parce que tous ne sont pas égaux. Le seul moyen pour qu’il n’y ait plus de sen­tences de classe, c’est qu’il n’y ait plus de class­es. […] Le seul moyen pour que la jus­tice ne soit plus bour­geoise, c’est que le pro­lé­tari­at puisse lui aus­si l’administrer […] et y inter­venir sou­veraine­ment.”

Le dis­cours est donc glob­al et porte bien au-delà de la seule mag­i­s­tra­ture. Mais, attar­dons-nous encore un instant sur cet instru­ment du sys­tème: quelle con­fi­ance le citoyen lamb­da peut-il avoir envers un sys­tème judi­ci­aire comme le nôtre, qui peut se per­me­t­tre n’importe quel abus et n’importe quelle erreur sans jamais devoir en répon­dre? Nos mag­is­trats, si cer­tains l’ignorent encore, sont non seule­ment “indépen­dants”, mais aus­si non incrim­inables et inamovi­bles (sinon par la pro­mo­tion). Nous n’avons pas été sur­pris qu’un con­damné à per­pé­tu­ité récem­ment libéré après vingt ans de prison – parce que recon­nu inno­cent – à qui l’on demandait à la télévi­sion s’il éprou­vait de la ran­cune, se soit empressé de répon­dre, en le répé­tant plusieurs fois, qu’il par­don­nait à tous. Car il peut encore s’estimer heureux: les cas de recon­nais­sance des erreurs judi­ci­aires sont plus excep­tion­nels que rares. Com­bi­en d’autres con­damnés sur la base de vagues indices purg­eront l’intégralité de leur peine? Celui-ci, l’État le dédom­magera d’une aumône, mais les mag­is­trats respon­s­ables d’une erreur aus­si désas­treuse ne fer­ont l’objet d’aucune procé­dure, au con­traire ils seront pro­mus. Nous approu­vons la toute récente relaxe des Bebawi10 Dans une affaire à rebondisse­ments très médi­atisée, les époux Bebawi sont accusés en 1964 du meurtre d’un jeune indus­triel égyp­tien à Rome avant d’être relaxés pour insuff­i­sance de preuves en 1966. En 1968, ils seront con­damnés en appel à 22 ans de prison, mais le juge­ment ne sera finale­ment pas exé­cuté. Mais s’il s’était agi d’un paysan sicilien, l’insuffisance de preuves aurait-elle suf­fi à le sauver de la per­pé­tu­ité? À ce qu’il sem­ble, jusqu’à présent, l’insuffisance de preuves aura surtout servi à la relaxe des assas­sins de la mafia.

Les jeunes de Pari­ni ont eu presque trop de défenseurs, des bour­geois libéraux aux com­mu­nistes en pas­sant par l’Osser­va­tore romano

11 L’Osservatore romano est un quo­ti­di­en pub­lié par le ser­vice d’information du Vat­i­can

, sans compter de nom­breux mag­is­trats et le vice-prési­dent du Con­seil. Pourquoi faudrait-il que nous nous joignions à ce con­cert? C’est une affaire classée: un authen­tique acci­dent de la mag­i­s­tra­ture milanaise. Le procès des jeunes qui avaient dif­fusé des tracts anti­mil­i­taristes est en revanche rien moins que classé, en dépit de la relaxe. Bien sûr, l’affaire de la Zan­zara sor­tait telle­ment d’un autre âge qu’elle ne pou­vait qu’engendrer une prise de posi­tion qua­si unanime de l’opinion publique (con­fi­nant dans l’isolement le dot­tor Lanzi, mal­gré la sol­i­dar­ité récon­for­t­ante que lui a exprimée le pro­fesseur Papi, alors encore recteur de l’Université de Rome). Mais l’archaïsme du procès inten­té aux anti­mil­i­taristes, en dépit de l’intérêt infin­i­ment moin­dre de l’opinion publique, est tout aus­si remar­quable. Les avo­cats en ont appelé à la Con­sti­tu­tion, à la Résis­tance antifas­ciste, au con­cile œcuménique (tan­dis que le pro­cureur, le dot­tor Alma, citait à l’appui de sa thèse des sen­tences du tri­bunal spé­cial fas­ciste). Mais il est bien évi­dent qu’ici et main­tenant, la lib­erté sex­uelle est une reven­di­ca­tion beau­coup moins inquié­tante que la sor­tie de l’OTAN, et même que la recon­nais­sance de l’objection de con­science. L’affaire des jeunes anti­mil­i­taristes n’est pas classée, non seule­ment parce que le ver­dict de relaxe n’est pas défini­tif, mais aus­si parce qu’ils sont seuls, parce que le mou­ve­ment ouvri­er n’est pas prêt à les soutenir dans leur lutte. Et pour ne s’attacher qu’à un aspect sec­ondaire – mais très grave –, la manœu­vre d’intimidation exer­cée sur les imprimeurs peut s’estimer gag­nante (et ce n’est pas un hasard non plus si dans le procès de la Zan­zara, la seule con­damna­tion pronon­cée l’ait été à l’encontre de l’imprimeur). »

Et il est vrai, en effet, que l’affaire de la Zan­zara a été le symp­tôme d’une sit­u­a­tion cul­turelle par­ti­c­ulière­ment rétro­grade et que la rapi­de sol­i­dar­ité « démoc­ra­tique » qui a entouré des lycéens de Pari­ni aura aus­si servi à occul­ter les con­flits réels. Les jeunes d’alors toléraient mal l’existence qui leur était imposée, ils oscil­laient entre révolte exis­ten­tielle et besoin d’engagement poli­tique. Dans ce monde habité de grands imag­i­naires, ils pos­sé­daient un out­il de com­mu­ni­ca­tion capa­ble d’unifier le « temps vécu »: le grand véhicule de la « nou­velle musique ».

dans ce chapitre« Don Milani: Let­tre à une maîtresse d’écoleFran­co Bolel­li: La révo­lu­tion cul­turelle de la musique »
  • 1
    Pietro Ingrao est né en 1915. Résis­tant, col­lab­o­ra­teur de L’Unità clan­des­tine pen­dant la guerre, il en devient le directeur entre 1947 et 1956. Député du PCI pen­dant dix lég­is­la­tures, il incar­ne, lors du XIe con­grès (1966), l’« aile gauche » du par­ti, en rup­ture avec le stal­in­isme. Elle s’inscrit dans la per­spec­tive d’une réno­va­tion du PCI sur le plan tant de la démoc­ra­tie interne que du « mod­èle de développe­ment ». Proche de la ten­dance du groupe Il Man­i­festo (Lucio Magri, Rossana Rossan­da), ce qui ne l’empêchera nulle­ment de vot­er l’exclusion de ses mem­bres en 1969, il défend alors une dynamique d’union entre les « gauch­es » des par­tis, le mou­ve­ment syn­di­cal et les mou­ve­ments soci­aux. Il meurt à 100 ans le 27 sep­tem­bre 2015


    Gior­gio Amen­dola (1907–1980), qui sera opposé à Ingrao pour la suc­ces­sion de Togli­at­ti à la tête du par­ti, a lui aus­si été résis­tant. Au nom du PCI, il signe en 1943 le « pacte d’unité d’action » avec les social­istes et le Par­ti d’action, et intè­gre la même année le com­man­de­ment mil­i­taire des Brigades Garibal­di (avec notam­ment Lui­gi Lon­go et Gian­car­lo Pajet­ta). Au XIe con­grès, il défend une ligne de col­lab­o­ra­tion avec le PSI et la per­spec­tive d’une nou­velle majorité en avançant l’hypothèse d’une « réu­ni­fi­ca­tion » des gauch­es. Il est par­ti­san de la représen­ta­tion de la classe ouvrière dans les insti­tu­tions poli­tiques nationales et son action vise à faire du PCI un par­ti de gou­verne­ment. À la fin des années 1970, il sera à l’avant-garde de la répres­sion con­tre les mou­ve­ments de lutte armée, appelant dans L’Unità en juin 1977 à « bal­ay­er les équiv­o­ques afin de savoir qui veut com­bat­tre pour la démoc­ra­tie et est prêt à tous les sac­ri­fices, et qui est de l’autre côté » (voir à ce pro­pos chapitre 11 – Et puis il y a aus­si la nicodémite : entre­tien avec Gior­gio Amen­dola, p. 578 sqq.)
  • 2
    Dans la suite du texte, le terme « démoc­ra­tique » ren­voie d’une part aux forces pro­gres­sistes de la « société civile », qui aspirent à une mod­erni­sa­tion des insti­tu­tions (et par­fois sim­ple­ment à « l’ouverture d’esprit » de cer­taines com­posantes de la bour­geoisie), et d’autre part, de manière plus spé­ci­fique après 1968, à ces expéri­ences de cri­tique du statut dis­ci­plinaire, du rôle social et de la pro­fes­sion. Ces secteurs « démoc­ra­tiques » par­ticiper­ont plus tard de ce qu’on appellera « la crise des pro­fes­sions », de l’éducation au jour­nal­isme, de la mag­i­s­tra­ture à la psy­chi­a­trie. C’est pourquoi on retrou­vera ce terme sou­vent accolé à des champs pro­fes­sion­nels (mag­i­s­tra­ture « démoc­ra­tique », 1964 ; psy­chi­a­trie « démoc­ra­tique », 1973)
  • 3
    Path of glo­ry, 1957 ; Dr Strangelove, 1963 ; Peau noire, masques blancs 1952 ; L’An V de la révo­lu­tion algéri­enne, 1959 ; Les Damnés de la Terre, 1961 ; Pour la révo­lu­tion africaine, 1964 ; Une Journée d’Ivan Den­nisso­vitch, 1962
  • 4
    Le code Roc­co, du nom du min­istre de la jus­tice de Mus­soli­ni sous lequel il a été pro­mul­gué, est encore le code pénal en vigueur en Ital­ie. Out­re un usage éten­du de la peine de mort, il rete­nait notam­ment le délit d’outrage con­tre la per­son­nal­ité de l’État
  • 5
    Ser­gio Bianchi attribue la pater­nité de cette notion à Elvio Fachinel­li : « Fachinel­li […] a mené cette bataille anti-idéologique à l’intérieur même du mou­ve­ment en s’intéressant notam­ment à ce qu’il appelait le “pré-poli­tique”. Il voulait com­pren­dre ce qu’il y avait avant le poli­tique dans la for­ma­tion de la sub­jec­tiv­ité mil­i­tante, quels sont les élé­ments qui déter­mi­nent une con­science com­mune de la révolte. Ce qui précède la lutte poli­tique, c’est la révolte sub­jec­tive qui n’implique pas néces­saire­ment une appar­te­nance théorique et idéologique préex­is­tante. Quand cette sub­jec­tiv­ité prend une dimen­sion de masse, on assiste à ce qu’on appelle les “mou­ve­ments de révolte exis­ten­tielle” », La horde d’or, jour­nal de tra­duc­tion n° 1, entre­tien avec Nan­ni Balestri­ni et Ser­gio Bianchi, sep­tem­bre 2008 – disponible
  • 6
    Les « cielli­ni » sont les mem­bres de « Cielle », acronyme phoné­tique de « Comu­nione e lib­er­azione », tout comme « Giesse » est l’acronyme phoné­tique de « Gioven­tù stu­den­tesca ». Un peu comme si on abrégeait à l’écrit les Jeuness­es com­mu­nistes en « Jicé »
  • 7
    Créé au milieu des années 1950, le Par­ti­to rad­i­cale s’imposera dans la vie poli­tique ital­i­enne à par­tir de la fin des années 1960 sous l’impulsion de Mar­co Pan­nel­la, qui sys­té­ma­tis­era le recours aux référen­dums pop­u­laires (prévus par la Con­sti­tu­tion) sur des ques­tions con­cer­nant société ital­i­enne. Il en sera de nou­veau ques­tion aux chapitres 9, 10 et 11.
  • 8
    Cesare Lom­broso (1835–1909), pro­fesseur de médecine légale, est l’un des fon­da­teurs de l’école ital­i­enne de crim­i­nolo­gie. Con­nu pour ses thès­es sur le « crim­inel né », il ten­tait, à par­tir d’études phrénologiques et phys­iog­no­moniques, de repér­er les crim­inels, con­sid­érant qu’il s’agissait d’une classe hérédi­taire iden­ti­fi­able par l’apparence physique. Il dis­tin­guait en Ital­ie la « race du Sud », qu’il jugeait inférieure, de la « race du Nord » et con­sid­érait que les femmes étaient moins sujettes à la crim­i­nal­ité en rai­son de leur moin­dre intel­li­gence et de la nature plus inac­tive de leur vie. Voir la dis­cus­sion de ces thès­es dans Stephen Jay Gould, La Mal-mesure de l’homme : l’intelligence sous la toise des savants [1981], Odile Jacob, 1997
  • 9
    Quaderni pia­cen­ti­ni, n° 27, juin 1966
  • 10
    Dans une affaire à rebondisse­ments très médi­atisée, les époux Bebawi sont accusés en 1964 du meurtre d’un jeune indus­triel égyp­tien à Rome avant d’être relaxés pour insuff­i­sance de preuves en 1966. En 1968, ils seront con­damnés en appel à 22 ans de prison, mais le juge­ment ne sera finale­ment pas exé­cuté
  • 11
    L’Osservatore romano est un quo­ti­di­en pub­lié par le ser­vice d’information du Vat­i­can